Publication : Maupassant Guy de, Correspondance, tome I, pp. 259-260, édition établie par Jacques Suffel, Le Cercle du bibliophile, Évreux, 1973, avec notes de l’auteur.
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À Gustave Flaubert

Ministère
de l’Instruction Publique
et des Beaux-Arts
Secrétariat
1er bureau
Paris [février 1880.]
Mon bien cher Maître,
Charpentier, que je viens de voir, m’a dit que mon volume était reçu, archireçu, et que je pouvais compter paraître avant le printemps. Merci.
Nous n’avons pas au ministère de bibliothèque pédagogique. La nôtre ne se compose que de documents administratifs, recueils de lois, de décrets, d’arrêtés, ouvrages politiques et « vomissements économiques ». Mais je vais savoir quelle grande bibliothèque de Paris a la spécialité des ouvrages relatifs à l’enseignement, et je m’y rendrai.
Je vous envoie un modèle de demande pour M. Turquet ; c’est pompeux avec intention, je connais l’homme que la sonorité des mots : « Gloire Nationale », « Patrie », « Maître de la sculpture moderne » font toujours vibrer.
Je me charge de remettre cette demande, et j’ai la conviction que le marbre vous sera donné.
Je vous dirai, d’ici à 5 ou 6 jours si vous pouvez compter sur moi aux jours gras. Je crois que « oui » cependant.
Je vous enverrai demain ou après-demain les épreuves de ma nouvelle Boule de Suif, en vous priant de les lire. Je ne puis faire que des changements de mots, car nous nous sommes tous engagés à ne pas changer le nombre de lignes, ce qui bouleverserait tout le volume. Mais l’épithète est une chose grave qui peut toujours être modifiée.
Je vous enverrai aussi un volume qu’Hennique m’a chargé de vous remettre et un discours du coiffeur Lespès, œuvre que j’ai découverte dans un cabinet public.
Je vous embrasse tendrement, mon bien cher Maître.
Tout à vous.
Guy de Maupassant1
Le Château des Cœurs fait très bien.

1 Cf. réponse de Flaubert, Correspondance (éd. Conard, tome VIII, N° 1940) : « ... je considère Boule de suif comme un chef-d’œuvre... »