À Gustave Flaubert
Ministère de l’Instruction Publique et des Beaux-Arts Secrétariat 1er bureau |
Paris, le 21 février 1880. |
Mon bien cher Maître,
Quel fut mon étonnement en lisant ce matin votre lame dans le Gaulois. On m’avait formellement promis de ne rien publier sans mon ordre, et je devais corriger moi-même ces épreuves. Cela n’aurait pas été inutile, comme vous verrez. J’avais mis entre parenthèses le passage « Bardoux » pour qu’il fût supprimé. Ils se sont contentés de reproduire les parenthèses. Enfin, je viens de courir, furieux, au journal. On m’a répondu que Raoul Duval était venu hier lui-même donner l’ordre de publier, trouvant la chose urgente. Le bruit court que je serai poursuivi et condamné. Pourquoi ? Cela passe ma raison. J’ai reçu une lettre froide de Bardoux qui me donne rendez-vous pour demain matin. Je crois qu’il se trouve compromis parce que j’ai dit qu’il avait admiré cette pièce. Le bon d’Osmoy m’a promis toute son influence.
J’ai mis des sangsues, mais mon œil ne va guère mieux, je n’y vois pas. Je vous embrasse bien tendrement.
Je vais aller dans une heure chez M. Maurice Sand. J’ai chargé Charpentier de vous envoyer les livres mentionnés sur la liste spéciale que j’avais emportée.
À vous du fond du cœur.
1 Cf. réponse de Flaubert, Correspondance inédite (éd. Conard, tome IV, N° 1262).