À Hermine Lecomte du Noüy
Hôtel de Catane, Ragusa, 15 mai 1885. |
Chère Madame et amie,
Je veux chaque jour vous écrire pour vous demander des nouvelles et de vous et de votre famille ; et puis le voyage prend toutes mes minutes. Je me lève à quatre ou cinq heures du matin, et puis je roule en voiture et je marche sur mes jambes. Je vois des monuments, des montagnes, des villes, des ruines, des temples grecs étonnants en des paysages bizarres, et puis des volcans, de petits volcans qui crachent de la boue, et de grands volcans qui crachent du feu. Je vais partir dans une heure pour l’ascension de l’Etna. Comment allez-vous ? Votre mari est-il près de vous en ce moment ? comment vont votre fils ? votre mère ? votre frère ? Votre père est-il revenu ?
Je pense que je rentrerai à Paris dans quinze jours ou vingt jours. Et puis j’irai un peu à Étretat, et puis en Auvergne, à Châtel-Guyon, car mon estomac ne va guère et mes yeux ne vont pas du tout. Quant à mon cœur, il marche avec une régularité d’horloge et je grimpe les montagnes sans le sentir une seconde.
Écrivez-moi donc un mot à Rome, où je serai dans quelques jours chez le comte Primoli, Palazzo Primoli, via Torre di Nina.
Je vous baise les mains, chère Madame et amie, en me rappelant au bon souvenir de tous les vôtres.