Publication : Maupassant Guy de, Correspondance, tome III, pp. 263-264, édition établie par Jacques Suffel, Le Cercle du bibliophile, Évreux, 1973, avec notes de l’auteur.
Lettre précédente : 741 Lettre 742 — Lettre suivante : 743
Sommaire chronologiqueSommaire alphabétique

À Me Jacob

5 décembre 1891.
Mon cher Monsieur Jacob,
Comment ne m’avez-vous pas prévenu ? Ce n’est pas cet éditeur d’Amérique qui me prêtera cette énorme somme, et moi je ne l’ai pas.
Croyez-vous au procès gagné ? En tous cas, après toutes les catastrophes que j’ai eues avec ma famille il m’est impossible de trouver cette somme.
D’après les lettres premières de votre correspondant il se chargeait de tous les frais en gardant pour lui 20 %. C’était formel.
Peut-on alors retirer la plainte ? Je ne m’attendais nullement, à la façon dont se sont engagés les débats, à cette réclamation inconcevable.
Voici le fond de cette histoire. J’ai fait dans les Contes de la Bécasse un petit conte, Le Testament. On s’en est servi pour en tirer un long roman imbécile et on l’a écrit en anglais. C’est donc un plagiat d’abord, et on a signé de mon nom un livre dont on m’a volé le sujet. On a pris tous les noms de mes personnages dix ans avant ce que j’ai raconté en le racontant avec une maladresse que je ne puis accepter.
Je vous prie de me répondre poste pour poste, car la situation est très difficile.
Je vous serre cordialement la main.
Je suis en effet fort souffrant.
Guy de Maupassant