De François Tassart à Laure de Maupassant
Je vous remercie de votre lettre et comme vous me le dites je continuerai de m’entretenir avec madame d’Harnois
2 pour ce qui concerne monsieur. Je suis peiné madame de voir que votre santé n’est pas meilleure et je comprends très bien madame que la position de mon maître y est pour beaucoup. Pourtant Madame je crois pouvoir vous dire que malgré son état monsieur n’est pas malheureux. C’est presque inexplicable mais c’est comme ça monsieur ne souffre pas et se porte admirablement de corps. Nous désirons et voudrions plus madame, espérons que l’avenir nous satisfera ; maintenant madame je vais répondre à la lettre de madame Marie-Thérèse
3 ce qu’il ne m’est pas facile vu l’état de fatigue d’esprit que j’ai laissé Cannes [sic] : je puis pourtant assurer ceci — qu’il y avait dans la chambre du 1
er à droite
4 tous les papiers et coupe-papier
5 — dont madame parle, quatre, peut-être cinq volumes de monsieur Flaubert avec dédicace à Madame. Puis un atlas universel en langue anglaise c’est pourquoi monsieur l’avait apporté pour madame
6. Puis les dictionnaires et deux volumes d’un auteur ancien que monsieur avait achetés pour les revoir avant de faire son
Angélus7.
Pour les parfums madame il pouvait y avoir huit ou dix flacons
8 commencés dont un d’eau d’iris de Monte-Carlo au deux tiers pour l’eau de Cologne ne puis préciser [sic] cette affaire me parait fâcheuse madame pour les volumes de Mr Flaubert. Car monsieur y tenait beaucoup. C’est malheureux qu’ils n’aient pas été repris le jour même de notre départ.
J’envoie beaucoup de caresses à Mlle Simone. Recevez tous mes respects je vous madame aussi [sic] madame Marie-Thérèse.
François Tassart 17 rue Berton Passy Paris dimanche |
1 Le « style » de la lettre a été conservé mais l’orthographe corrigée.
2 Virginie d’Harnois, sœur de Laure.
4 Il s’agit du cabinet de travail de Maupassant au chalet de l’Isère à Cannes.
5 C’est avec un coupe-papier que Maupassant tenta de se suicider.
6 Laure connaissait parfaitement l’anglais.
7 Dernier roman inachevé de Maupassant ; on aurait bien aimé connaître le titre des deux volumes en question.
8 Selon le témoignage du poète Dorchain, il montrait sur sa table une rangée de flacons à parfums, avec lesquels, disait-il, il se donnait des symphonies d’odeur. Ce témoignage date du séjour de Maupassant à Champel, soit juillet 1891 (Lumbroso, Souvenirs sur Maupassant, Bocca, Rome, 1905, p. 56.)