Publication : Maupassant Guy de, Correspondance, tome I, p. 85, édition établie par Jacques Suffel, Le Cercle du bibliophile, Évreux, 1973, avec notes de l’auteur.
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À sa mère

Ce mardi, 14 septembre [1875].
Hier soir, en sortant de mon bureau, j’ai rencontré Gauthier, rue du Havre. Il allait prendre le train de Chatou. J’ai vu, le soir, Joinville et Léon Fontaine.
Paris est vide, vide, vide. Je n’ai pas rencontré un homme ayant l’air d’être entré une fois dans un salon, même pour y passer des rafraîchissements. Je suis sûr qu’il n’y a pas dix individus en même temps, rue Royale, et encore ils ont tous des blouses. Jamais je n’avais vu un désert pareil. Cela est singulier. Le silence et le calme étrange de cette grande ville ordinairement si bruyante ont quelque chose d’impressionnant. On croirait que la peste a passé par là et emporté les habitants. La chaleur est très grande. J’ai 26° dans mon bureau.
Adieu, ma chère mère. Je t’embrasse de tout cœur, ainsi qu’Hervé ; bien des choses à tout le monde. Écris-moi vite.
Comment va ta tête ?
Ton fils,
Guy de Maupassant