Du docteur Balestre
au docteur Meuriot
Monsieur et honoré confrère,
J’ai soigné Mr Guy de Maupassant et je suis le médecin de sa mère. Cette malheureuse dame croit toujours qu’on ne lui dit pas la vérité sur l’état de son fils. Elle relève dans les lettres de Madame d’Hormois [sic] et de François des contradictions, mais nous ne pouvons la rassurer en lui faisant admettre que l’état de son fils est changeant et que souvent les nouvelles sont contradictoires parce qu’elle s’appliquent à des journées différentes. Ces incertitudes la mettent dans un état d’anxiété grave qui me fait craindre pour elle-même. Ces craintes ont d’ailleurs déjà failli être justifiées.
Pour ces raisons et malgré les lettres qu’elle reçoit de sa sœur et de François, je viens vous prier de vouloir bien lui écrire quelquefois. Vos lettres calmeront des incertitudes et la mettront dans un état d’esprit plus rassurant. Je ne vois que ce remède, et s’il nous fait défaut, malgré l’affection et le dévouement qui l’entourent, nous marcherions sur quelque nouvel évènement tragique.
Je me permets donc, Monsieur et honoré confrère, de faire appel à votre bonté et de vous prier de nous donner un secours que seul vous pouvez nous donner.
Veuillez, Monsieur et honoré confrère, agréer l’hommage de mes meilleurs sentiments.
Veuillez adresser vos lettres directement à Madame de Maupassant, elle pourrait avoir des doutes si elles passaient par mon intermédiaire.