Le Fantastique

Étrange, angoisse et folie chez Maupassant



Caractéristiques du fantastique chez Maupassant :

    Le fantastique chez Maupassant est un reflet de ses propres angoisses bien plus que de son imaginaire. La peur, en tant que menace, en constitue l'élément essentiel. Elle ne naît pas d'un danger visible et rationnel mais échappe au contraire à tout processus de rationnalisation. Ainsi, dans La peur (1884), Maupassant écrit : « On a vraiment peur que de ce qu'on ne comprend pas. »
    « A mesure qu'on lève les voiles de l'inconnu, on dépeuple l'imagination des hommes. Vous ne trouvez pas, Monsieur, que la nuit est bien vide et d'un noir bien vulgaire depuis qu'elle n'a plus d'apparition.
    On se dit : “Plus de fantastique, plus de croyances étranges, tout l'inexpliqué est explicable. Le surnaturel baisse comme un lac qu'un canal épuise ; la science, de jour en jour, recule les limites du merveilleux”. »

    Dans la plupart des récits, la nuit et la solitude créent les conditions d'émergence du fantastique. Il suffit alors d'un évènement inattendu, d'une erreur de perception, d'une altération des sens, auditifs mais surtout visuels,  pour que la raison chancelle, pour que le récit bascule tout d'un coup dans l'étrange et l'angoisse. Chez Maupassant et contrairement à la littérature fantastique traditionnelle, il n'est pas besoin de décors surnaturels. Le fantastique demeure toujours dans la réalité et n'en est que plus inquiétant. Ainsi, comme le dit Jean-Marie Dizol, « il naît des mystères de la vie quotidienne et trouve son efficacité dans le vertige d'un homme qui ne comprend pas, cède à la peur et voit sa raison menacée ».
    A la peur, causée par un dysfonctionnnement des sens, succède la terreur et la folie comme en témoigne la progression dans les récits (Lui ?, Lettre d'un fou) dont Le Horla est la conclusion : l'illusion obsédante d'une présence mystérieuse qui prend le visage inquiétant et hostile d'un autre que soi-même et qui aboutit à la confirmation de cette existence.
    Contrairement à ce qu'on pourrait penser, le talent de Maupassant n'est pas dû à sa folie, qui n'apparaît que dans les dernières années de sa vie. De par les remarquables observations sur soi-même (autoscopie) qu'ils contiennent, ses récits sont la preuve d'une grande lucidité et ne peuvent pas être considérés comme l'oeuvre d'un fou. Il faut citer ici René Dumesnil : « ... on a dit : à cause qu'il était déjà fou, Maupassant a écrit son oeuvre. Il faudrait dire au contraire : malgré la maladie dont il redoutait qu'elle aboutît à la folie, [...] il est parvenu à écrire. On a fait de ses ouvrages une conséquence, un résultat d'un état mental morbide qui n'existait pas encore, alors qu'ils sont le fruit d'une révolte, alors qu'au lieu d'être le produit inconscient d'un malade, ils sont un témoignage de volonté et d'énergie lucide, parfois une espèce d'exorcisme ».
    Par ailleurs, le fantastique inspire Maupassant très tôt, dès ses premières nouvelles (La main d'écorché et Le docteur Héraclius Gloss) dans les années 1870 et il n'y a pas accroissement du nombre des contes fantastiques au cours des dernières années. Il faut y voir plutôt l'influence du grand-père maternel de Maupassant, Paul le Poitevin, qui s'est adonné aux sciences occultes, du climat de l'époque qui voit le développement de l'hypnotisme et de tout ce qui touche au psychisme et à son dérèglement, ainsi que de la rencontre dans sa jeunesse du mystérieux poète Swinburne chez lequel il découvre une main squelettique d'écorché, ce qui lui inspirera deux contes, La main d'écorché (1875) et La main (1883).

Le classement des oeuvres :

    On peut distinguer trois tendances, qui d'ailleurs ne sont pas exclusives entre elles : les contes d'angoisse, qui laissent toujours un sentiment de malaise, les contes de folie, mettant en jeu des personnages qui basculent peu à peu dans la folie et les contes étranges, moins violents que les précédents mais qui attirent tout de même l'attention par les phénomènes étranges et bizarres qu'ils relatent.

  Les contes d'angoisse :

  Les contes de folie :   Les contes étranges :